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Niki de Saint Phalle

Crucifixion, vers 1965

 

L'œuvre

Conçue pour être accrochée en hauteur, cette femme crucifiée se présente offerte au spectateur : entre ses bas et ses porte-jarretelles, les jambes largement ouvertes révèlent un pubis velu – un magma sombre de fil de laine. Figure archétypale, à la fois « mère ou putain », ce personnage peut susciter moquerie, révulsion ou fascination. Comme pour La Mariée, sa poitrine est couverte d’objets divers (jouets, fleurs artificielles…) mais, à la différence de celle-ci, l’artiste a ici introduit la couleur. Toutefois, ses attributs (les bigoudis) ainsi que son accoutrement contribuent à ancrer le personnage dans les années 1960. Après sa rencontre avec l’artiste Pop Larry Rivers, qui avait réalisé un dessin de sa femme enceinte, Clarisse Price, Niki de St Phalle abandonne peu à peu sa vision de la femme soumise victime de la violence du patriarcat. Elle crée alors une figure féminine à la fois puissante et joyeuse. Cette période correspond à une étape décisive dans l’œuvre de Niki de Saint Phalle : celle de ses premières Nanas, personnages aux formes rebondies, d’abord construites en papier mâché et en tissus puis, comme ici, en polyester peint, technique qui permet une polychromie plus éclatante. Par leur anatomie aux formes plantureuses et disproportionnées, les Nanas évoquent quelques statuettes de Vénus de l’époque paléolithique. Acquise en 1975, cette œuvre fait partie des acquisitions d’œuvres contemporaines juste avant l’ouverture du Centre Pompidou.


Biographie

Niki de Saint Phalle nait à Neuilly-sur-Seine en 1930, au sein d’une famille franco-américaine d’aristocrates, et grandit entre les châteaux familiaux en France et le New-York bourgeois. Excédée par un climat familial conflictuel, elle quitte sa famille très jeune et épouse l’écrivain Harry Mathews, avec qui elle s’installe en France en 1952. L’année suivante, elle sombre dans une grave dépression et découvre le pouvoir salvateur de la pratique artistique. Dès la fin des années 1950, Saint Phalle commence à assembler des objets sur la surface du tableau, son esthétique se rapproche des Nouveaux Réalistes et du néo dada. À la même époque, elle rencontre Constantin Brancusi, Eva Aeppli et Jean Tinguely qui deviendra son compagnon quelques années plus tard. À partir de 1960, elle se consacre entièrement à son art. En 1961, Saint Phalle crée ses premiers Tirs, parfois avec la participation du public. Elle tire à la carabine sur des sacs de peinture et des objets divers fixés à un support et recouverts de plâtre. La violence destructrice devient ainsi génératrice de l’œuvre. Parallèlement, Saint Phalle développe une pratique sculpturale dont la femme est le sujet central, représentant Mariées, Accouchements, Prostituées, Déesses et Sorcières comme autant d’archétypes des rôles assignés aux femmes. En 1966, son œuvre devient monumentale. Elle crée Hon (« elle » en suédois) pour le Moderna Museet de Stockholm : une Nana de 28 mètres de long, les jambes écartées accueillant le visiteur par son vagin. De 1978 à 1998, elle se consacre à la réalisation en Toscane du Jardin des Tarots. Elle quitte Paris au début des années 1990, pour s’installer en Californie suite à des affections pulmonaires causées par l’utilisation de la résine. En 1994, elle publie Mon secret, une lettre adressée à sa fille dans laquelle elle révèle l’inceste subi à 11 ans qui éclaire d’une nouvelle lumière son œuvre. En 1998, elle crée la série Black Heroes, où sont représentées des figures de la culture africaine-américaine. Niki de Saint Phalle s’éteint à San Diego en 2002 à l’âge de 71 ans.


Pour aller plus loin

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pour en explorer les détails


Les Nanas au pouvoir, un entretien avec Bloume Condominas, la petite fille de Niki de Saint Phalle

produite dans le cadre de l’exposition « Les Nanas au pouvoir » à la Galerie Mitterand à Paris du 4 novembre au 24 décembre 2021

Durée : 4'20''